Master Métiers du livre

Artisanat et écriture, les mondes de France

Sep 7, 2017 | Édition

Rencontre avec France Magne, une jeune passionnée de lecture qui travaille dans l’artisanat du livre. Relieuse de métier et auteure dilettante par passion, c’est sur la Toile qu’elle s’exprime et qu’elle invente des histoires pour son lectorat lorsqu’elle n’est pas en train de réaliser des créations. À l’heure où le numérique et Internet prennent une place de plus en plus importante dans nos vies, on pourrait croire que certaines sphères comme celle des artisans n’est pas influencée par ces technologies immatérielles.

Master 2 Métiers du livre - Université de Bourgogne - Portrait de France Magne, relieuse

La Toile et la Reliure

« Je pense qu’il n’est quasiment plus possible de se passer d’Internet pour l’artisanat. »

France Magne a suivi des études de restauration du livre et a travaillé dans un atelier de reliure où elle peut manipuler et restaurer des ouvrages anciens, et donc d’une valeur littéraire et culturelle importante, ainsi que permettre à des particuliers de faire relier leurs livres et proposer des créations. C’est un métier technique mais qui laisse une place pour la créativité pour ce qui est des compositions personnelles. Elle pense que même si certains artisans se passent encore d’Internet, et que cela est donc possible, il leur est difficile de se faire connaître. De plus, c’est un outil dont il faut, selon elle, profiter :

« Internet peut être utilisé pour vérifier certaines connaissances ou contacter des fournisseurs, clients ou autres professionnels. »

« Il permet aux autres de se faire une idée sur notre travail et/ou se rassurer après avoir eu vent de l’existence du professionnel. »

Les coordonnées, et la vitrine que propose Internet est un outil utile pour toute entreprise ou commerce, l’artisanat n’échappant pas à cette règle. Elle ajoute qu’en cas de perte des coordonnées, retrouver un artisan qui n’a pas de présence sur Internet est pratiquement impossible.

Elle précise pour les aspects techniques que « pour la reliure, création et restauration même, [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][Internet] nous est inutile. Tout est dans notre tête, notre cœur et nos mains : la connaissance, la passion, la précision et la patience. » Même si c’est un bon outil, il ne remplace pas le savoir-faire de l’artisan et son amour de l’objet et la passion de son métier.

« Internet est devenu indispensable pour faire connaître son métier »

France Magne possède aussi son propre site, Reliure France’aise, où elle explique son métier, ses compétences et montre ses créations et réalisations. À propos de ce dernier, France répond :

« Mon site Web m’a valu beaucoup de compliments de part de professionnels lors d’entretiens d’embauche, ainsi que de particuliers venus le consulter. »

Prouvant ainsi qu’une présence sur Internet est devenu utile pour augmenter sa visibilité ou montrer ses compétences. Elle ajoute cependant que son efficacité est relative :

« Pour le moment, c’est surtout le bouche à oreille qui m’a ramené des clients ; bien que le site les ait conforté sur mes capacités de relieur. »

Cela s’explique notamment par le fait que France débute dans le métier, et que son site est encore jeune. Avoir la démarche de créer son propre site n’est pas anodin, et en ce qui concerne ses projets, et la question de l’auto-entrepreneuriat, France s’illumine : « Mon rêve serait effectivement de reprendre ou créer une entreprise de reliure. Mais pour cela il faut avoir un local, des moyens financiers et de bonnes connaissances sur le marché afin de pouvoir se lancer. Malheureusement, je n’ai ni local, ni ressources financières pour le moment. Donc ce merveilleux projet est mis en attente pour le moment. »

Pouvoir écrire et être lu autrement

« Les fan-fictions sont tellement plus nombreuses et importantes qu’on ne le pense ! »

France est aussi passionnée d’écriture et aime raconter et créer des histoires. Les univers fictionnels ont pour tous les amoureux de la littérature, quelque chose de magique. Internet est une galaxie à portée de main car tout le monde peut s’y exprimer. Cela représente, pour quelqu’un qui veut partager son amour de l’écrit, une myriade d’opportunités. A propos de sa page sur le réseau social Facebook, France explique :

« J’aime aussi y publier des petits textes, des poèmes, mes ressentis ou opinions sur certains sujets qui me tiennent à cœur. »

Cette page, différente de son compte personnel, est dédiée au roman qu’elle écrit actuellement.

C’est naturellement que nous en sommes venus à parler de l’émergence des écrits sur Internet, et du genre de la fan-fiction, dont l’existence n’a pas vocation à être envoyée à un éditeur. À moins d’obtenir les droits de l’œuvre originale, ou bien d’être tout de même assez différente pour être considéré comme une œuvre à part et ne faisant donc pas partie du même univers. Ce fut le cas pour la première fois le 25 mai 2011, lorsque la trilogie Fifty Shades de E.L. James, qui puise sa source en tant que fan-fiction de la saga Twilight de Stephenie Meyer, fut publiée et rencontra un succès tel qu’une adaptation cinématographie suivit, allant de pair avec son statut de best-seller. La qualité littéraire de tout-à-chacun ou Monsieur Tout-le-monde étant sujette à discussion, la plupart des gens considèrent la fan-fiction comme un sous-genre qui n’a pas de lettres de noblesses. Pour des raisons évidentes de droits d’auteurs, elles restent confidentielles :

« C’est pour cela que ces histoires resteront sur les sites qui leur sont approprié plutôt que d’être publiées en librairie. »

France en a même écrit quelques-unes par plaisir.

« S’il n’y avait pas de lecteurs, il n’y aurait pas d’auteurs »

Questionnée sur son activité d’auteure dilettante sur Internet, France confie :

« J’ai énormément besoin de l’avis de mes lecteurs ».

Internet permet une communication démultipliée et des retours rapides sur les textes qu’elle publie sur cette plateforme. L’avis de ceux qui apprécient son écriture est précieux, et : « Le lien auteur-lecteur est une chose essentielle pour moi. Savoir ce qui a plu ou non, ce qui les a tenus en haleine, les a fait pleurer, rire, crier ou trembler… C’est tellement excitant de les écouter raconter mes récits, leur ressentis, à travers leurs mots et expressions ! »

Ce lien est également entretenu par sa page Facebook qui lui a permis de retrouver un lecteur, et d’échanger avec des gens vivant à des kilomètres. Même si rien ne remplace une vraie conversation et une rencontre réelle, Internet rapproche tout de même les individus et libère la parole. Sur ce fait précis, France déplore cependant certains cas où les efforts de base ne sont pas faits en matière d’orthographe, de respect d’autrui ou de langage SMS sur la Toile : « Je n’aime pas devoir passer vingt minutes à décoder un message. »

« La lecture est un plaisir qu’il est dommage de gâcher par flemmardise ou irrespect. »

Loin de se laisser abattre par ces cas minoritaires, elle voit Internet comme un outil précieux d’échange. C’est cet échange qui, comme elle le dit, « rend mes histoires vraiment et réellement vivantes. »

« Je pense que cela aide énormément suite à la publication pour se faire connaître »

Pour les raisons de droits d’auteur et de propriété intellectuelle évoquées précédemment, la fan-fiction ne peut être accessible en librairie. Aujourd’hui, avec les franchises qui lancent des « séries dérivées », « préquelles », « suites » et autres « univers alternatifs tirés de telle ou telle saga », les frontières entre inspiration et plagiat sont floues. Le genre de la fan-fiction, bien qu’existant sur Internet, reste toutefois honnête : l’intention est claire, les auteurs précisent ne pas posséder les droits ou les personnages de l’œuvre de base, et publient sur un site dédié.

Internet a permis, dans certains cas, notamment celui des vidéastes connus sur le réseau Youtube, de se faire publier lorsqu’il écrivent un livre. Avoir un public fidèle de base est un coup de pouce pour se faire publier ou connaître. Certains éditeurs s’engouffrent dans ce marché, et les tables de librairies fleurissent parfois d’ouvrages écrits par des personnalités d’Internet. De plus, un auteur présent sur les réseaux sociaux peut se faire connaître du plus grand nombre. En ce qui concerne ses projets d’écriture qui ne sont pas des fan-fictions, France nourrit, comme nombre d’auteur amateur, le rêve d’être publiée un jour, mais n’a, pour le moment, pas eu l’occasion d’entrer en contact avec un éditeur via Internet. En précisant toutefois :

« J’ai rencontré un auteur de talent, sur un réseau social, ainsi que d’autres écrivains par le biais d’amis communs. »

Internet facilite le réseautage et permet de faire des rencontres, mais dans un marché comme l’édition traditionnelle, la part de hasard reste importante, et Internet ne change pas la donne. Des auteurs sont découverts sur Internet, mais cet outil n’altère pas la réception d’un manuscrit, son intérêt ou ses chances d’être publié.

À un niveau plus personnel, la fan-fiction n’a pas vocation à être publiée : elle est certes faite pour partager, mais à une communauté restreinte, et est aussi faite pour soi-même. France conclut notre entretien avec une anecdote à ce propos :

« J’ai une amie relieur qui a déjà relié une fan-fiction imprimée par un fan, habitant en Angleterre. Comme quoi, tout est possible. »

 

Clément Bossus – M2 Métiers du livre 2016-2017

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